LIQUÉFACTION DU SOLIDE… POUR DES JOINTS SOLIDES
Mon approche globale du design de vie pourrait sembler trop simple pour être crédible. Mais en toute honnêteté, je choisis ce qui me fascine, j’apprend à maîtriser la chose, et puis je facture. La soudure TIG ne fait pas exception.
Dès mon enfance, la métamorphose soudaine du métal sous l’effet de l’électricité m’a captivé. Ce matériau d’apparence indestructible, devenu soudain flaque liquide, fusionné instantanément en une seule pièce comme s’il en avait toujours été ainsi. Génial, non? Rappelez-vous le polymorphe de «Terminator 2»… Et en plus on me paie pour ça? Top!
Quand l’URSS existait encore — et que mes parents suisses «intellectuels» travaillaient à Moscou sans trop surveiller — les mécanos locaux «rustiques» m’ont initié à la soudure à l’électrode bien avant que je ne me mette sérieusement à la peinture de paysages. Cette odeur caractéristique que j’associais au travail du métal? En fait, c’était l’haleine alcoolisée du prolétariat, et non l’air chargé d’ozone que je respire aujourd’hui. J’ai arrêté l’alcool en 2003, mais jamais la soudure.
POURQUOI LE TIG?
J’ai appris la soudure MIG bien plus tard, une fois revenu en Europe, quand j’ai cofondé Idelekka, une entreprise spécialisée en fabrication sur mesure d’équipements cinéma, pour construire les rigs uniques destinés à mon premier long métrage en 2011. Mais le TIG reste mon procédé de prédilection.
- Élégance, précision, zéro étincelle: Contrairement au MIG qui privilégie la vitesse, le TIG mise tout sur le contrôle absolu. Un cordon régulier «pile de pièces de monnaie» réalisé dans les règles de l’art est structurellement supérieur, visuellement impeccable et sans aucune projection comme avec le MIG ou la soudure à l’électrode enrobée.
- Qualité: Associé à un système triphasé refroidi par eau, le TIG garantit une pénétration, une pureté et une résistance incomparables. Les essais de rupture le prouvent: les pièces cassent autour, jamais sur la soudure elle-même.
- Polyvalence: Le courant alternatif/continu (AC/DC) me permet de travailler aussi bien l’acier «basique», les inox variés, l’aluminium aéronautique que le titane. Saviez-vous que les sous-marins soviétiques en titane étaient soudés dans d’immenses hangars remplis d’argon, où les ouvriers respiraient grâce à des bouteilles d’air individuelles? De la réflexion en vase clos à un tout autre niveau.
Flow méditatif: Je ne vais pas mentir — poser des cordons parfaits sur une structure métallique sablée avec soin, la pédale gérant finement l’intensité en virage serré, torche CK rotative à 360° en main — ça relève presque de la transe. C’est profondément apaisant, immédiatement concret, incomparable à la production cinéma ou même à la photographie.
MAÎTRISE TECHNIQUE: LE CÔTÉ GEEK
Idéalement, souder dépasse le simple respect des «bonnes pratiques» ou l’activation du mode «intelligent» d’un transfo «smart» — c’est comprendre en profondeur la physique fondamentale du plasma et du flux d’électrons. Une éducation soviétique orientée STEM m’aide à maîtriser les variables cruciales que beaucoup ignorent encore:
- Barrière d’oxyde: Pourquoi et comment la briser avant de souder? Pourquoi l’énergie nécessaire pour casser la liaison ionique de l’Al₂O₃ est-elle 5 fois supérieure à celle requise pour créer un nouveau réseau métallique?
- Physique du cône plasma: Comment l’affûtage du tungstène influence-t-il la géométrie de l’arc?
- Zone affectée thermiquement (ZAT): Pourquoi sa gestion rigoureuse évite-t-elle les déformations et microfractures?
- Fréquence pulsée: Ajustement précis pour une soudure adaptée aux normes aérospatiales.
Seul le soudage laser rivalise sur l’échelle geek du TIG. Très impressionnant sur matériaux fins.
INTÉGRATION À LA FABRICATION: SOUDER EN PENSANT AU DESIGN
En tant que designer produit et ingénieur fabrication, je ne me contente pas de suivre bêtement un plan comme un soudeur «lambda» — j’anticipe:
- Conception accessible: Je prends en compte les contraintes d’accès, les angles, les montages spécifiques. Après tout, celui qui galèrera sur une soudure d’angle inversée complexe, ce sera peut-être moi — raison pour laquelle je prototype de A à Z.
- Optimisation des plans techniques: Annotations précises sur dissipation thermique, contrôle des déformations et stratégies multipasses.
- Montages et rotatifs sur mesure: Conception de gabarits ultra-précis réduisant temps de réglage et améliorant la répétabilité.
RÉSEAU INDUSTRIEL ET SENS DES AFFAIRES
Mes relations directes avec les fabricants d’équipements font gagner du temps et de l’argent:
- Machines et consommables: Contacts directs chez Lincoln Electric, Miller, ESAB, Fronius, Kemppi, GYS et accessoiristes comme Furick et CK — sans intermédiaire.
- Logistique gaz:
- Aux US? Facile.
- En France? Quasi-impossible sauf contrat annuel complexe.
- En Suisse? Encore un autre monde.
Je traite directement avec Air Products, Air Liquide, Linde et Messer pour optimiser les coûts et approvisionnement.
Ma formation à ESCP Europe m’offre une vision business intégrale du métier pourtant très pointu.
SÉCURITÉ ET MANAGEMENT D’ÉQUIPE
Je ne plaisante pas avec les EPI — car j’ai appris à mes dépens:
- Vestes, tabliers, gants sur mesure: indispensables pour de longues sessions, quand la fatigue cohabite avec les habitudes. J’ai encore une cicatrice d’un essai malheureux avec des gants courts. La ZAT n’est pas l’endroit idéal pour s’appuyer avec de la peau exposée. Aïe.
- Masques auto-obscurcissants: Je standardise sur Speedglas 3M panoramique, mais si mon équipe préfère Optrel, aucun souci.
SUIVANT : ANATOLY IVANOV / SERVICES / INGÉNIEUR CVC